Je rêve d’une maison
Qui serait pleine de roses
Dehors, dedans, à foison
Dans les vases du salon
Ou dans un livre en rayon
En vers aussi bien qu’en prose.
J’en voudrais voir sur les murs
Autrement qu’en toiles peintes
Pétales pâles, cœurs durs
En guirlandes sur les plinthes.
J’en voudrais comme en bosquets
Dans les coins de chaque salle
En fresques ornementales
De merveilleux reposoirs.
La salle avant la chapelle
La chambre en aurait l’encens
Et la maison serait belle
D’or, de platine, et de sang.
Et puis, quand viendrait l’automne
Et que le Ciel bien-disant
Annoncerait qu’il ordonne
Les vendanges du présent.
Alors les rosiers d’octobre
S’effeuilleront sous le ciel
Et j’oublierais d’être sobre
Pour m’enivrer de leur miel.
Le rosier qui s’abandonne
Toujours odoriférant
C’est comme un dieu qui pardonne
Ouvrant les bras en mourant.
Sur le beau marbre des dalles
Je voudrais alors que mes roses
En beaux tapis de pétales
Dédaigneux qu’on les arrose.
Rosiers mordus par l’hiver
Je partagerai dans l’ombre
Les frissons de vos brins verts
Témoins de chagrins sans nombre
Mais que vos branches ronceuses
Soient encor autour de moi
Quand les lunaisons joyeuses
Ramèneront les beaux mois.
Juliette Goublet