VII
Un lit de feuilles...des baisers...
Un soir...firent pour me griser
De telles choses
Que j’emporterai jusqu’au matin
Le rêve ardent d’un beau jardin,
Parfum de roses...
Et que que respire toujours
Sur mes lèvres, parfum d’amour
Une âme éclose...
X
Tu m’as dit : "Ce matin, je t’aime et suis heureux" ;
Et, dans l’instant où tu disais ces mots, j’ai vu,
Ainsi qu’en un miroir, au creux de tes bras nus,
Une abeille envolée d’une rose mousseuse...
Il est, ô mon amie, une raison qui mêle
Notre bonheur et notre amour à cette abeille...
XI
Mon coeur est un joyau que tes mains se disputent
Et que tu laisses choir quand tu l’as caressé,
Comme je laisse choir cette rose effeuillée
Que ma lèvre en jouant ceuillit à ta ceinture...
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Amie, dis-moi pourqoui, comme une plante frêle,
S’incline, sous le vent léger de tes cheveux,
Mon âme de vingt ans, amoureuse et nouvelle ?
Dis-moi aussi pourquoi, comme une pâle rose
Qui mourrait sans parfum dans ta chambre bien close.
Mon amour se meurt-il dans le fond de tes yeux ?...
XII
Voici des vers : Encore un fugitif poème...
Des mots aprés des mots, toujours des mots, pourqoui ?
Pour dire que je pleure ou que je ris, les mêmes
Mots...Que je suis heureux ou que je souffre : "je t’aime"
Ces mêmes mots, en ce poèmes, écrits pour Toi !
Oh ! la banalité de ces mots ! tant de choses
Sont en moi, et je n’ai pour les dire qu’eux seuls ?...
c’est l’heure où se sont clos les calices des roses ;
Leur parfum évadé passe sur notre seuil,
La chambre s’est emplie de sa présence, _et seul,
Je ceuille leur parfum qui sur mes mains se pose...
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...Ta pensée entre en moi avec l’odeur des roses,
Et, sur le souvenir frêle et doux de ces fleurs,
Fragile ainsi que fut notre amour, ô ma soeur,
Je clos les yeux...et porte à mes yeux mes mains closes...
II
Je pense à vous, petite amie, et jevous aime...
Longuement, lentement, dans la fin de ce jour,
Alors que l’ombre douce et propice à l’amour
Confond dans le lointain les arbres et la plaine,
Seul, le front dans les mains, je pense et je vous aime...
Le soir, autour de moi, se pose sur les choses :
Sur les pauvres fauteuils donr le velour est roux,
Sur la table où, parmi des souvenirs de vous,
Une lettre d’amour fait tâche rose,
Sur mes bras qui voudraient étreindre votre cou,
Sur ma lèvre attentive à ses baisers trés doux,
Et jusque dans mes yeux, qui lentement se closent,
Le soir, le calme soir, plein de rêves, se pose,...
— C’est l’heure où nous aimons à rester sans parler,
Les bras unis, le front tout proche, où nos pensées
Reviennent de trés loin pour s’enfermer en nous,
L’heure où le livre reste ouvert aux mêmes pages,
L’heure où ma main s’endort, amie, sur tes genoux
Et où mes yeux, qui ne voient plus ton visage
Qu’un profil adouci, mes yeux larges d’espoir
Cherchent à deviner l’amour en tes yeux noirs,_
Ce soir, mon âme est calme et mes rêves sont doux,
Je pense à toi, ô mon amie aux désirs fous,
A ton geste boudeur qui demande des roses
Pour effeuiller, tout en songeant à d’autres choses,
La fleur enamourée dont le parfum se meurt...
Je pense à tout ce qui fera battre ton coeur,
A des rires d’enfant et à des pleurs de femme,
A des baisers, la nuit, alors qu’un peu de flamme
Du grand feu qui s’éteint vient lécher nos rideaux
Et que sur notre lèvre à peine quelques mots
Font un murmure doux, trés doux et monotone...
Je pense au bel instant où ta bouche se donne,
Et je voudrais, ce soir, les yeux brillants d’amour
Sentir sur mon bras nu ton front de cheveux lourd
Et poser sur ton sein, qui prés de moi frissonne,
Cette caresse lente et pour ton désir bonne
Qui te fera m’aimer jusqu’à l’heure du jour...
journal des roses
septembre 1910