Je voudrais faire avec une pâte de fleurs,
Des vers de langoureuse et glissante couleur,
Où la Rose d’été, l’oeillet et le troène
Répandraient leur arôme et leur douce migraine ;
Des vers plus odorants qu’un parterre en juin,
Où l’on marche en posant sur son coeur une main,
Où, las de la lumière et des herbes trop belles,
On soupire en rêvant sous de larges ombrelles ;
Des vers qui soient pareils à nos premiers jardins,
Où, remuant le sable et les cailloux, soudain,
Le paon traînait le beau feuillage de sa queue
Prés de la mauve molle et des bourraches bleues ;
Des vers toujours gluants de sucre et de liqueurs,
Comme le doux gosier des plus suaves fleurs,
Comme la patte aigue et mince de l’abeille
Enduite de miel fin et de poudre vermeil.
Et comme le fruit cahud du tendre framboisier,
Qu’étant petite enfant mon âme vous baisiez,
Car vous aimiez déjà les choses de la vie,
Le matin odorant la pelouse ravie.
Les Rosiers emplis d’ombre et d’insectes légers,
L’inexprimable odeur du divin oranger,
Avec le coeur penchant et le fervant malaise
De la Sainte Catherine à Sainte Thérèse...
Journal des Roses
janvier 1909